Voile intégral : réaction de Dominique Voynet ? une réunion houleuse ? Montreuil
La presse s’est récemment fait l’écho d’une réunion organisée par le député Jean-Pierre Brard ? Montreuil, autour de la question du port du voile intégral, et qui s’est terminée en pugilat. Dominique Voynet réagit :
« Une soirée organisée dans les locaux de l’école Diderot, ? l’initiative de Jean Pierre Brard et de l’association qu’il anime, ? laquelle ni les conseillers municipaux ni moi même n’avions été invités, a tourné mercredi dernier au pugilat, en raison de l’intrusion d’un groupe d’extrémistes, inconnus ? Montreuil mais sévissant, semble-t-il, dans d’autre villes de la banlieue.
Si je regrette qu’aucun dispositif destiné ? garantir la tranquillité de la soirée n’ait été prévu par les organisateurs, qui n’ont sollicité en ce sens ni les services de la ville, ni ceux de l’Etat, je condamne évidemment avec la plus grande fermeté cette intrusion et ces violences.
Je tiens ? cette occasion ? faire connaître ma position sur le fond et sur la forme des questions posées par ce débat.
A Montreuil, les relations entre la municipalité et les différents cultes, et les relations entre les communautés religieuses elles mêmes, ont été depuis deux ans heureusement pacifiées et débarrassées des enjeux politiciens qui les polluaient auparavant.
En témoignent, s’agissant de l’exercice du culte musulman, le soutien accordé ? la fédération cultuelle des associations musulmanes de Montreuil, qui avance dans la construction de la mosquée de la rue de Rosny. Celle-ci, entreprise sous l’ancienne municipalité, retardée par des procédures judiciaires inopportunes, ouvrira ses portes ? l’issue des travaux, en 2011. En témoigne également l’avancée dans la recherche d’une solution pour l’aménagement d’une ou de deux salles de prière consacrées au culte musulman dans le Bas Montreuil, en remplacement de lieux insalubres et non conformes ? la dignité ou aux règlements de sécurité, et désormais fermés.
Ainsi ont été réunies depuis deux ans les conditions pour que la religion musulmane soit progressivement exercée dans notre ville dans des conditions convenables et conformes ? l’esprit et ? la lettre de la loi de 1905, et plus généralement des lois de la République.
Je m’opposerai ? tout retour en arrière et ? toute action provocatrice d’où qu’elle vienne, qui viserait ? troubler cette situation pacifiée et ? attiser les haines et les divisions entre les communautés religieuses, ou entre croyants et non croyants.
Parmi ces tentatives figurent en premier lieu celles de l’extrémisme et du fanatisme religieux, sous toutes ses formes.
Mes convictions laïques et féministes et mes engagements contre ses différentes formes, sont anciennes et bien connues : elles se sont manifestées par exemple par des actions de soutien très concrètes aux victimes du terrorisme islamiste en Algérie ou aux personnes ciblées par des appels au meurtre, lors de l’affaire des caricatures reproduites par le journal Charlie Hebdo.
Elles se manifestent également par le fait qu’? la différence de nombreuses personnalités qui adoptent des comportements ? géométrie variable selon les lieux, les circonstances ou les interlocuteurs, je veille au respect de la liberté de culte mais je ne participe jamais en ma qualité de Maire ? des cérémonies ou des fêtes ? caractère religieux.
Je me suis prononcée clairement contre le port de la burqa dans l’espace public.
Dans le même temps, je prends fermement mes distances avec ceux qui, dans les deux camps, et tout en mettant en avant la liberté des femmes, se gardent bien d’écouter ce qu’elles ont ? dire.
Refusant toute instrumentalisation de cette question ? des fins politiques, je me tiens ? égale distance de ceux qui, malgré l’échec du débat sur l’identité nationale, qui s’est terminé dans la confusion, tentent de récupérer les voix qui se sont portées sur les candidats d’extrême droite lors des derniers scrutins, et de ceux qui, défendant une conception datée et sectaire de la laïcité, répondent aux provocations des extrémistes par des initiatives inadaptées, quand ils ne les suscitent pas, amplifiant ainsi le malaise et le sentiment de rejet de nombreux musulmans.
Je redoute en effet que le débat tel qu’il est engagé, n’attise certaines formes d’islamophobie, et ne réactive une haine ancienne dirigée contre l’immigration en général, contre l’immigration issue du Maghreb ou d’une partie de l’Afrique plus particulièrement.
Inquiète devant le risque d’une dialectique dangereuse des affrontements et des divisions, en pleine période de crise économique, sociale et écologique, j’appelle nos concitoyens ? les refuser et ? les combattre ; ? rejeter les dérives sectaires et les comportements intolérants ; ? travailler simplement au respect du droit ? pratiquer une religion ou de n’en pratiquer aucune.
Telle est une des bases fondamentales de la paix civile et du bien vivre ensemble, et l’un des biens les plus précieux de la République et de la Démocratie.