Rendre le Méliès aux amoureux du cinéma, mon édito dans Tous Montreuil du 12 février 2013.
Depuis plusieurs semaines, c’est la crise au Méliès. Ce n’est pas la première fois – on se souvient de la mobilisation des cinéphiles contre sa municipalisation en 2002, et de celle orchestrée autour des menaces pesant sur le projet de transfert du cinéma dans le quartier de la mairie en 2007 – mais c’est sans doute l’une des plus sérieuses de son histoire que nous venons de vivre.
Je veux rassurer les amoureux du cinéma – ils sont nombreux – auxquels il fut proposé de « sauver le Méliès » ou « d’empêcher la privatisation » et qui, aujourd’hui encore, s’interrogent : il n’est vraiment pas question de ça !
Les faits sont simples : d’importantes irrégularités financières ont été découvertes dans les comptes du cinéma municipal. Une enquête interne a montré que, depuis des années, une partie des recettes – on parle ici de dizaines de milliers d’euros et probablement davantage – est soustraite de la caisse, sans aucune comptabilité, et réaffectée par l’équipe, ou une partie de l’équipe, de son propre chef… Alertée, j’ai informé le procureur de la République, comme la loi m’en fait l’obligation. La direction générale des finances publiques a examiné les faits, confirmé leur gravité et transmis à son tour le dossier au procureur.
Maire de cette ville, j’en assume toutes les responsabilités, les plus beaux moments comme les plus ingrats, les moments de fête comme les coups durs. Mais vous me pardonnerez de le dire franchement : cette crise, je ne l’ai pas souhaitée, et je la vis douloureusement, difficilement, sur le plan humain comme sur le plan politique.
Parce que j’ai du me taire, pour préserver les droits des agents mis en cause, pendant toute la durée de l’enquête, pendant que se déchaînaient tous azimuts, sur les réseaux sociaux, dans les journaux, par voie de tract, tous ceux qui pensent que ce n’est pas si grave et que « tout le monde fait ça ». Ce qui est faux. Et constitue quand même, soit dit en passant, un curieux argument.
Parce que j’ai du, à l’issue de l’enquête, prendre en conscience et dans le climat qu’on imagine, les décisions de bonne gestion et de reconstruction de l’équipe qui s’imposaient… avec la volonté de ne pas accabler ceux des agents qui, peut-être, n’avaient pas eu conscience du caractère profondément anormal et illégal des pratiques antérieures.
La période a été difficile. Pour les spectateurs, privés de cinéma. Pour les agents du cinéma et pour tous leurs collègues. Pour l’administration de la ville, bousculée et harcelée.
Il s’agit maintenant de rendre le Méliès aux amoureux du cinéma et de réussir le magnifique projet que constitue l’installation du Nouveau Méliès dans les six salles du Quartier de la Mairie, à la fin de l’année. Je fais confiance à la nouvelle équipe, et à sa directrice, pour relever ce défi!
Il en va et il en ira du Méliès comme de la Comédie française, du Festival d’Avignon ou de la Cinémathèque… Ce sont les équipes qui sont au service du lieu et du projet culturel, et pas l’inverse ! C’est le cas au CDN, au Conservatoire de Musique et de Danse, au théâtre Berthelot, à la Bibliothèque, au théâtre des Roches… grâce à des hommes et à des femmes qui mettent leur énergie, leur créativité, leur savoir-faire et leur savoir-être au service des œuvres, des auteurs et… des publics ! Merci à eux.
Dominique Voynet
@DominiqueVoynet