Réforme territoriale : mascarade et manoeuvre électoraliste…

Le Sénat examinait, les 15 et 16 décembre, le premier des projets de loi du gouvernement relatifs ? la réforme des collectivités territoriales. Ce texte très court a pour objectif de rendre concomittant le terme, en 2014, des prochains mandats des conseillers généraux et régionaux, en anticipant ainsi la création possible, début 2010, des conseillers territoriaux, sensés les remplacer. Retrouvez le discours prononcé par Dominique Voynet, dénonçant notamment le mode de scrutin envisagé, qui n’a d’autre but que d’organiser un hold-up des exécutifs locaux au profit de l’UMP.

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Nous examinons ce texte au lendemain d’une mémorable « erreur humaine », « une bourde » a écrit Le Monde, ? cause de laquelle le Sénat a rejeté un autre des textes organisant la réforme électorale voulue par le Gouvernement. Certains me reprocheront peut-être de céder ? la facilité, mais je veux encourager nos collègues ? persister dans l’erreur, cette erreur qui avait tout de l’acte manqué. Comme on nous a demandé hier d’adopter la réforme de la taxe professionnelle avant de débattre de l’architecture des collectivités, il faudrait aujourd’hui voter par anticipation le résultat de la réforme des collectivités territoriales. Beaucoup s’en émeuvent, y compris au sein de la majorité.

Ce texte est la première étape d’une plus vaste entreprise de démolition des collectivités locales. Comment penser que l’on réduit le très complexe mille-feuille administratif -objectif que nous partageons- en créant un nouvel élu, le conseiller territorial ? En fait, il s’agit seulement pour la majorité, minoritaire dans les urnes, de reprendre plus aisément le contrôle des collectivités. Le Président de la République a compris que la machine ? souder l’électorat de la droite qu’est l’UMP était efficace au seul premier tour, car elle laisse peu de réserve de voix pour la suite. Il supprime donc le second tour pour s’assurer le contrôle des régions, des départements et, demain peut-être, des villes avec moins de 35 % des voix ! Telle est la vérité nue de la réforme électorale : gagner en trafiquant les règles du jeu ? son avantage, détourner la fonction d’arbitre du Président de la République pour favoriser la position de certains joueurs ! Dans une assemblée qui a honoré, par le passé, son rôle de gardien de l’équilibre des institutions, je veux croire qu’une manoeuvre aussi grossière que scandaleuse ne pourra pas être approuvée. De nombreuses voix se sont élevées pour rappeler combien ce texte est étranger ? la tradition républicaine et défavorable ? la parité. Sur ce point, Mme Dini a rappelé la révolte des femmes élues, ajoutons-y celles des femmes qui ne sont pas encore élues et de nombreux hommes. La proposition consistant ? prévoir un suppléant du sexe opposé ne tient pas quand près de 80 % des titulaires sont des hommes. Il reste aux suppléantes le seul espoir que le titulaire cède sa place pour cause de cumul des mandats ou de décès…

Le rejet du texte hier soir s’expliquerait par une « erreur humaine ». Aujourd’hui, l’erreur serait de ne pas rejeter celui-l? . En tout cas, nous ne prêterons pas la main ? cette mascarade !

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