Loi sur l’eau

Intervention de Dominique Voynet dans la discussion générale, 7 septembre 2006

Monsieur le Président, Madame la Ministre, Mesdames et Mesieurs,

L’écologie sera très probablement au cœur des débats de 2007. Et on peut parier que la plupart des candidats, aux législatives comme aux présidentielles, veilleront ? truffer leurs discours de vigoureuses protestations de vertu écologique.

Ce n’est pas de discours électoraux dont nous avons besoin.

Assez de discours. Assez de descriptions d’une situation qui, certaines années un peu plus, d’autres un peu moins, les efforts des hommes y contribuant moins que les caprices de la météo, se dégrade.

Sécheresse ? Modification bien réelle du régime des précipitations (sur fond de changement climatique). 2/3 des départements français sont en situation « préocupante » ou « délicate ».

Encore faut-il convenir que son impact ne serait pas aussi fort, ni aussi problématique, si nous avions fait, il y a déj? plusieurs décennies, des choix plus responsables, en matière agricole, en matière industrielle.

Certains le dénoncent haut et fort. D’autres sont plus pudiques (rapporteur : évoque le « bilan mitigé es actions concrètes »)

Assez parlé : il faut agir. Mais agir comment ? Réparer les dégâts en faisant payer la facture aux usagers domestiques qui n’en peuvent mais ? Sensibiliser ? Recommander ? Ou changer en profondeur la politique de l’eau en France afin de gérer de façon responsable, et sur le long terme, des ressources fragiles.s’inscrire dans une logique de responsabilité écologique, sur le long terme Pompages, barrages, usines d’assainissement de l’eau de plus en plus sophistiquées, usines de dépollution de plus en plus coûteuses, et de plus en plus voraces en énergie fossile, pour éliminer lisiers, fientes et boues, et même désalinisation d’eau de mer… A quel prix la fuite en avant ? Avec quelles conséquences pour les différentes activités concernées ? Je pense par exemple aux malheureux ostréiculteurs de Marennes-Oléron, qui subissent depuis des années les conséquences de la raréfaction et de la dégradation de la qualité de l’eau douce apportée dans le bassin d’Arcachon. Et auxquels aucune mesure sérieuse n’a jamais été proposée. Je ne fais pas allusion ici au désastreux projet de barrage de la Trézence, heureusement recalé par le Conseil d’Etat, mais ? un usage plus responsable des ressources, tenant compte des besoins des différents utilisateurs !

C’est que, voyez-vous, la liste des délires technocratiques est longue qui permet ? certains d’espérer gagner du temps, encore, avant de reconnaître qu’il faudra bien changer les pratiques agricoles (élevage intensif qui mine le sol et l’eau de la Bretagne, irrigation du maïs, mais pas que du maïs) . Diluer la pollution d’une eau impropre ? la consommation humaine, en raison de concentrations excessives de pesticides ou de nitrates, par l’apport d’une eau plus conforme. Projets de barrages destinés ? soutenir les étiages et ? permettre la poursuite des politiques d’irrigation, présentés aux élus et riverains comme des plans d’eau touristiques.

Cet été la situation s’est aggravée par rapport aux années précédentes et ce malgré les différentes mesures qui ont été prises. Mais quelles sont ces mesures ? Madame la ministre de l’Ecologie ici présente et Monsieur le ministre de l’Agriculture, dont je regrette au passage l’absence, ont adressé une lettre aux agriculteurs en leur recommandant d’être vigilants ce qui n’a pas empêché l’irrigation massive des cultures comme le maïs ainsi que les gaspillages répétitifs détectés d’ailleurs dans les départements le plus touchés par la sécheresse.

Cette année encore, le Gouvernement avec la signature de Madame la ministre a autorisé les centrales EDF ? relâcher des eaux plus chaudes dans les rivières en faisant comme si la situation n’était pas assez grave. Donc, on ne donne que des recommandations aux agriculteurs, on autorise EDF ? dépasser toutes les limites du raisonnable et en même on incite les familles modestes ? se rationner et les consommateurs moyens ? économiser drastiquement ? Mais de qui se moque-t-on ?

Ces dérives montrent bien qu’une politique e dans un domaine aussi sensible peut avoir des conséquences immédiates incommensurables. Il y a donc urgence mais ce projet de loi n’est pas ? la hauteur et ne peut y répondre.

Face ? cette urgence, nous, Les Verts, pouvons faire des propositions concrètes :

– Tout d’abord, il faut changer les règles de la PAC qui n’incite en rien les agriculteurs ? économiser l’eau et ? en préserver la qualité. Et qu’on ne me dise pas que c’est ? cause de Bruxelles puisque c’est bel et bien le Président de la République qui s’est battu pour défendre cette PAC contre les intérêts de nos voisins européens mais aussi contre les intérêts de la majorité des Français. Alors aujourd’hui, pour assurer la qualité et la durabilité de l’activité agricole, il faut que la France devienne porteuse, au niveau européen, d’une réforme courageuse de la PAC. – Je pense également, et Jean Desessard l’évoquera plus longuement tout ? l’heure, ? une tarification progressive de l’eau pour inciter les gros consommateurs ? économiser et ? changer leur mode de production au lieu d’incriminer les ménages les plus modestes (pénalisés par la part fixe) ;

Pour aller jusqu’au bout dans la logique « pollueur-payeur », nous devons introduire une redevance sur les excédents d’azote et mener une politique de taxation et d’incitation fiscale pour réduire d’au moins 70% l’utilisation des pesticides et l’émission des nitrates ;

Enfin, pour traiter aussi le problème en aval, la France doit « renouveler » son équipement des stations d’épuration d’eau et limiter au maximum les gaspillages liés aux spécificités techniques du traitement, du transport et de l’utilisation de cette ressource si rare.

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