« Je ne voterai pas en faveur du plan Sarkozy »

Le Sénat examinait cet après-midi et ce soir le projet de loi de finances rectificative pour le financement de l’économie, c’est-? -dire le plan gouvernemental contre la crise financière. Dominique Voynet, avec les sénateurs Verts, a décidé de ne pas voter ce plan « injuste » et « inefficace ».

A noter que les sénateurs Verts avaient déposé plusieurs amendements, défendus en séance par Jacques Muller, visant ? renforcer les conditions sociales, environnementales et éthiques du soutien de l’Etat aux établissements bancaires (sur les paradis fiscaux, les rémunérations des dirigeants…). Ces amendements ont tous été rejetés par la majorité sénatoriale, ce qui justifiait plus encore l’opposition des sénateurs Verts au projet de loi.

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Déclaration de Dominique VOYNET

« Je ne voterai pas en faveur du plan Sarkozy »

Comme une majorité de nos concitoyens, je n’ai confiance ni dans ceux qui nous proposent aujourd’hui un plan de sortie de crise ? 360 milliards d’euros, ni dans la capacité de ce plan ? nous sortir de cette crise. A court, ? moyen et ? long terme.


On ne peut pas nous dire aujourd’hui « Sauve qui peut, votez, et demain nous ferons une autre politique », alors que tout dans ce plan annonce la poursuite de la même politique.


Ce plan jette un rideau de fumée sur les causes et les responsabilités de la crise :


Il efface les ardoises et renfloue les mêmes opérateurs. Quelles raisons aurions nous de croire que ceux qui ont transformé l’économie du monde en vaste casino, ne reproduisent pas ? l’avenir les mêmes comportements ?

Contrairement d’ailleurs aux propos du Président de la République il y a quelques semaines, rien dans le paquet proposé ne ressemble ? de vagues précautions contre les dérives qui nous ont amenés ? la catastrophe : pas de mise en cause des paradis fiscaux, pas de suppression des parachutes dorés ou des stocks options…


Aucune des mesures n’est encadrée : ni conditions ? la distribution de crédit, ni règles prudentielles nouvelles, ni réforme des agences de notation ne sont prévues ne serait ce qu’a minima, pour orienter les sommes mises sur le tapis, vers d’autres usages que ces dernières années. Moins courageux que les mesures anglaises, il ne pose évidemment pas la question d’un pôle financier public +pour intervenir sur les marchés.


Ce plan n’est d’ailleurs pas vraiment solidaire d’un point de vue européen : le gouvernement participe de la course ? qui renflouera le plus « ? la louche » ses propres établissements nationaux, quitte ? accroître la concurrence entre les banques européennes. Aucune décision ne va au demeurant dans le sens d’un véritable pilotage économique commun. Rien ? l’examen ne prévoit un minimum de défense de l’Europe contre les fonds souverains extra-européeens


Le plan est déséquilibré, injuste, il aboutira ? l’arrivée ? faire payer les pauvres : il joue sur un seul partenaire, les banques. Il ne s’engage directement ni sur le soutien aux ménages surendettés par les crédits immobiliers, ni sur le soutien aux Pme, ni sur la recherche dans les secteurs stratégiques de demain, ni sur le soutien aux collectivités locales qui étouffent financièrement et qui constituent pourtant les agents essentiels du soutien par exemple ? l’activité du bâtiment.


Au moment où on distribue de si imprudentes garanties, on pioche dans le 1% logement et dans les livrets de développement durable, on soumet ? la discussion la loi Boutin, on réforme la Dotation sociale urbaine, on renonce au malus écologique. Si le gouvernement veut vraiment l’union nationale, qu’il revienne sur le paquet fiscal et qu’il oriente les sommes ainsi récupérées vers l’investissement écologique.


Le plan est d’ailleurs écologiquement douteux : la reprise de 30 000 logements « gelés » constitue un encouragement ? continuer ? construire n’importe quoi n’importe où n’importe comment.


Notons le, les sommes que les droites européennes n’ont pas trouvées depuis 15 ans pour soutenir l’action contre le dérèglement climatique ou la crise énergétique, composante majeure de la crise actuelle, ont été trouvées en quinze jours pour ventiler le système de crédit. Et notre gouvernement qui mégote sur le financement du grenelle de l’environnement est bien prompt ? secourir un système de crédit dont on nous disait il y a quelques temps encore qu’il était le plus solide du monde.


Le plan sera inefficace : La course au crédit de ces 20 dernières années et son effondrement actuel sont la conséquence de l’incapacité du système d’une part ? répartir équitablement les richesses, d’autre part ? gérer des multiples conséquences de la pression sur la ressource écologique.


Si aujourd’hui la crise financière nourrit la crise économique, depuis 20 ans l’impasse économique et écologique alimente l’impasse financière. Traiter une crise sans traiter les autres, c’est reproduire une stratégie contre productive.


Le plan ne suffira donc pas : demain les acteurs financiers seront de plus en plus gourmands, ils reviendront passer encore et toujours ? la caisse, l’instabilité des valeurs boursières est une donnée de très long terme.


Au total, ce plan, jette un rideau de fumée sur les causes de la crise et sur les solutions réelles. La droite française au pouvoir depuis 7 ans, si elle n’est pas la seule responsable de la situation, n’a cessé d’entretenir comme ses homologues européens les enchaînements spéculatifs qui explosent aujourd’hui. Elle espère que tout repartir comme avant, je n’y crois pas.


C’est pourquoi je ne voterai pas en faveur de ce plan.

Dominique VOYNET

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