Doublement de l’autoroute A9 : lettre de Dominique Voynet ? Jean-Louis Borloo
Monsieur le Ministre d’Etat,
Le Grenelle de l’environnement avait acté, voil? plusieurs mois, l’inversion des priorités publiques en matières d’infrastructures de transports. De la préférence ancienne pour le tout routier et l’automobile, nous devions progressivement favoriser d’autres modes de déplacement.
Le Grenelle laissait toutefois ouverte une brèche, justifiant le maintien de projets routiers ou autoroutiers sous réserve de sécurité ou d’intérêt local. Le flou d’une telle définition, nous le pressentions, risquait de permettre dans les faits la réalisation de la plupart des projets.
Ce sont les faits qui diront si nous avions raison d’être sceptiques. Je dois vous avouer, M. le Ministre, que je ne vois pour l’heure guère de raison d’être plus optimiste que je ne l’étais.
Je m’interroge ainsi sur le projet de doublement de l’autoroute A9, ? la hauteur de Montpellier, sur lequel j’ai été saisie par des élus et des associations locales. De tels projets, il en existe en France dans la plupart des agglomérations : ils sont évoqués depuis dix ou vingt ans, portés par tel ou tel groupe d’intérêts comme la solution miracle aux engorgements et ralentissements chroniques qu’on constate toujours ? mesure qu’augmente le trafic automobile. C’est ainsi que, suivant la logique de la fuite en avant, on a ces dernières décennies élargi les rocades des villes, bouclé les boulevards périphériques et, c’est le cas ici, qu’on espère aller encore plus loin.
La société Autoroutes du Sud de la France (ASF) reconnaît pourtant que le doublement de l’autoroute A9 ne résoudra en rien les difficultés de circulation et de congestionnement constatés. Au terme de l’enquête relative ? la déclaration d’utilité publique, les commissaires enquêteurs avaient, eux, émis un avis défavorable ? l’unanimité au projet, ce qui est assez rare pour être souligné.
Il est vrai que le projet aurait, parmi d’autres effets collatéraux, pour conséquence d’enfermer entre une voie autoroutière et une Ligne ferroviaire ? grande vitesse (LGV) un futur quartier de 30 000 habitants, comprenant selon le PLU « logements collectifs, activité tertiaire, équipements publics ».
Il est assez clair, au vu de tous ces éléments, que le doublement de l’autoroute A9 non seulement ne résout aucun des problèmes auxquels il devrait répondre, mais qu’en outre il créé de nouvelles difficultés.
Je vous saurai donc gré, Monsieur le Ministre d’Etat, de m’indiquer ce que vous entendez répondre ? l’inquiétude et ? la mobilisation légitimes des riverains, des associations et des élus qui s’opposent ? ce projet.
Dans l’attente de votre réponse, je vous prie d’agréer, Monsieur le Ministre d’Etat, l’expression de ma considération respectueuse.
Dominique VOYNET