Crise financière : extrait des interventions de Dominique Voynet dans le débat parlementaire
Le Sénat débattait mercredi dernier du plan de sauvetage du secteur bancaire proposé par le gouvernement. Ci-dessous, quelques extraits du débat parlementaire au cours de la discussion du projet de loi article par article. On trouvera sur le site du Sénat le compte-rendu intégral des discussions.
Philippe Marini, dont on lira quelques courtes interventions, est rapporteur général (UMP) de la Commission des Finances du Sénat.
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M. le président. La parole est ? Mme Dominique Voynet.
Mme Dominique Voynet. Messieurs les ministres, la situation est exceptionnelle : partout, en Amérique, en Europe, en Asie, les gouvernements sont confrontés ? l’obligation d’inventer des solutions inédites, forcément complexes et difficiles ? mettre au point dans l’urgence.
Je ne vous ferai pas l’insulte de penser que le Gouvernement n’envisage que la mobilisation rapide de centaines de milliards d’euros, pour revenir le plus vite possible au business as usual. Simplement, ? cette heure, nous ne voyons pas se dessiner les contours du plan de relance économique qui serait indispensable pour compléter le plan de soutien financier ? des banques pour lesquelles aucune mesure d’encadrement sérieuse n’a été mise en place.
Il est probable que ce plan ne suffira pas, que les banques, de plus en plus gourmandes, vont revenir ? l’assaut et que l’instabilité des valeurs boursières non financières va se poursuivre.
Il est probable que la crise économique, se nourrissant de la crise financière, puisse, ? son tour, alimenter cette dernière. Traiter l’une sans traiter l’autre, c’est une politique contre-productive.
Mais, surtout, le plan tel qu’il nous est proposé, sans contrepoids, sans encadrement, est un plan immoral,…
M. Philippe Marini, rapporteur général. C’est faux !
Mme Dominique Voynet. …qui efface l’ardoise des responsables de la crise actuelle, qui renfloue les traders.
M. Philippe Marini, rapporteur général. C’est complètement absurde !
Mme Dominique Voynet. Rien, dans le « paquet », ne ressemble ? une vague sanction contre les responsables. Quelle raison avons-nous de croire que, demain, ceux qui ont fait du profit rapide avec l’argent des autres ne recommenceront pas ?
Mme Annie David. Exactement !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Quel sens des responsabilités : c’est merveilleux !
Mme Dominique Voynet. Ce plan n’est pas encadré. Aucune disposition n’est prévue dans le texte pour conditionner, ne serait-ce que vaguement, l’utilisation des quelque 360 milliards d’euros débloqués ? d’autres fins que celles qui ont été jusqu’? présent envisagées. On prend les mêmes et on recommence ?…
Ce plan n’est pas vraiment solidaire d’un point de vue européen. Bien sûr, nous avons constaté avec tristesse que les États européens n’avaient pas d’abord jugé indispensable ou naturel de coordonner leurs efforts. Mais, aujourd’hui même, alors qu’un semblant de position commune a été arrêté, convenons-en, c’est ? qui renflouera le plus ses propres banques,…
M. Philippe Marini, rapporteur général. Vous voudriez que l’on renfloue celle des autres ?
Mme Dominique Voynet. …quitte ? mettre les autres en difficulté.
En l’absence de décisions concernant un véritable pilotage économique commun, en l’absence de mécaniques de protection de l’Europe contre les fonds souverains extra-européens, nous sommes loin du compte.
Par ailleurs, ce plan est déséquilibré et injuste. En effet, au moment où vous mobilisez 360 milliards d’euros pour soutenir les banques, nous piochons dans le « 1 % logement » et dans les livrets de développement durable, nous nous apprêtons ? voter la loi « Boutin » sur le logement qui n’est pas financée, nous réformons la DSU au détriment des communes qui en auraient le plus besoin, nous renonçons au malus écologique.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Vous avez tout compris…
Mme Dominique Voynet. Si le Gouvernement veut l’unité nationale, qu’il revienne sur le paquet fiscal, qu’il abandonne ou suspende l’application du bouclier fiscal et qu’il oriente les sommes ainsi récupérées vers des investissements d’avenir riches en emplois non délocalisables et permettant, notamment, de desserrer les contraintes sur le plan écologique.
Messieurs les ministres, je voudrais me tromper. J’attends évidemment que vous nous présentiez le complément au plan financier que le Sénat va aujourd’hui voter. Nous avons besoin de relancer la machine économique, de le faire avec le souci de répondre aux besoins des plus modestes, aux besoins des familles, et ce en matière de logement, de transport, de santé, d’éducation. La liste est longue des besoins ? satisfaire ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC. – M. Jacques Muller applaudit également.)
M. Philippe Marini, rapporteur général. Quelle démagogie !